Moratoire : texte de JP Dionisi

Merci à  Jean-Paul Dionisi d’avoir partagé ce point de vue avec l’AFrESHEB. (Texte du 15 avril 2021).

Plan de prévention des départs non souhaités des adultes en Belgique :

  • Instruction du 22 janvier 2016
  • Rapport IGAS
  • Rapport Sénat en 2016 à télécharger ici (322 ko)
  • Groupe de travail CNH « prévention des départs non souhaités en Belgique » 2018-2019

Sur la période récente, pour l’ensemble de la France, ce sont 500 à 550 adultes qui partent chaque année en Wallonie, majoritairement de l’Ile-de-France, des Hauts de France et du Grand Est :

  • 350 accueillis sur de nouvelles places
  • 200 sur des places libérées (« turnover »)
moratoire

Le moratoire sur les créations de places dans des établissements belges accueillant des Français fige les places disponibles à leur niveau au 28 février 2021. Par conséquent les 350 adultes qui partaient chaque année en Belgique sur des places nouvellement créées ne le pourront plus. Où iront-ils ??

Pourquoi ces départs en Belgique ? Ce n’est certainement pas par plaisir de l’éloignement, mais bien par absence de solution dans leur région. S’il y avait suffisamment de réponses en France, le flux vers la Belgique se tarirait de lui-même, il n’y aurait pas besoin d’un moratoire. En outre, pour les franciliens, la Belgique est plus accessible que certaines régions françaises telles que par exemple la Corrèze ou la Lozère, terres d’implantation de nombreux établissements pour personnes en situation de handicap. Certains établissements wallons organisent chaque semaine des navettes vers la région parisienne, permettant ainsi les retours en famille aussi souvent que souhaité.

Pour certaines personnes, l’accueil dans un établissement belge résulte d’un choix délibéré, du fait de la qualité de l’accompagnement attesté par des familles qui se « passent le mot ». Cette qualité n’est pas présente partout (Jean-François CHOSSY dans son rapport disait qu’en Belgique il avait vu « le meilleur et le pire »). Un jeune adulte de ma connaissance avait été admis dans un établissement belge ; un nouvel établissement s’étant créé en région parisienne, sa maman avait fait le choix de le rapatrier, il a été admis dans ce nouvel établissement. Quelques mois après, cette maman est retournée supplier le directeur de l’établissement belge de reprendre son fils, jugeant catastrophique sa prise en charge dans l’établissement français.

Les admissions dans un établissement belge interviennent la plupart du temps à l’issue d’un parcours fait d’une ou de plusieurs ruptures, à la suite d’une sortie d’un établissement médico-social français, d’une période à domicile sans solution ou d’une une prise en charge en structure psychiatrique.

Par conséquent il aurait été plus judicieux de créer d’abord les réponses en France, AVANT d’empêcher des départs vers la Belgique qui se font par défaut. La conséquence est que, faute de places en France, et dans l’impossibilité de trouver une place en Belgique du fait du moratoire, les personnes seront maintenues dans des IME au titre de l’amendement Creton, à la charge exclusive de leur famille, à l’hôpital psychiatrique ou dans des structures inadaptées, si elles n’en sont pas exclues en raison de leurs problèmes de comportement que les équipes professionnelles ne sont pas en mesure de gérer.

En Ile-de-France

Entre 2018 et 2019, ce sont 132 personnes franciliennes de plus qui ont rejoint des établissements wallons. Si on admet l’hypothèse que ce chiffre se reproduit chaque année, en 2021 ce seront plus de 130 adultes franciliens qui seront sans solution du fait du moratoire (à noter que pour le moment le moratoire ne concerne que les MAS et FAM, financés tout ou partie par la sécurité sociale, les foyers non médicalisés ne sont pas concernés par le moratoire, mais cela peut évoluer. Dans les flux indiqués ci-dessus, 41% sont orientés vers des foyers non médicalisés, 35% vers des MAS, et 24% vers des FAM).

Un plan de création de places nouvelles est annoncé par l’ARS Ile-de-France (support de présentation à télécharger ici – 659 ko) pour la réunion du 31 mars 2021). Il prévoit en particulier la création dans chacun des départements d’une unité d’accueil renforcé de 6 places soit un total de 48 places. C’est une très bonne chose, mais c’est très insuffisant, car si cela suffit pour répondre aux besoins la première année, les besoins nouveaux apparaissant la deuxième année et les suivantes ne pourront être satisfaits, puisque les 48 places seront en grande partie encore occupées. De plus, les ouvertures se réaliseront au mieux dans un ou deux ans, où seront accueillis ces adultes qui ne trouvent pas de place ni en France, ni en Belgique ?

Outre ces unités d’accueil renforcé sont prévues des solutions plus inclusives, habitat partagé, GEM… qui ne répondent pas aux besoins des adultes qui partent en Belgique. D’autres créations de places, par extension de FAM ou MAS existants, ou dans de nouveaux projets, sont annoncées, mais la vigilance s’impose lorsqu’on voit surgir des projets tels que celui de Bécheville dans les Yvelines, où 116 personnes atteintes de handicap psychique et de TSA seront regroupées sur un même lieu, aux antipodes des petites structures préconisées par toutes les recommandations.

Question parlementaire sur les placements de Français en situation de handicap en Belgique

Notre analyse : le député LaREM qui pose la question avec sa brosse à reluire ne donne que les chiffres des Français dépendant du CNSE, et pas ceux des départements, vu que le placement en Belgique génère en vérité près de 500 millions d’euros annuels. Il ne relève même pas que les 90 millions accordés au régions sont une somme sur 3 ans, ni que le moratoire est intervenu avant même que les solutions soient effectives sur le sol français. Il tait aussi le fait que ces solutions seront des aides à domicile, ce qui ne correspond pas à la demande des familles pour les personnes avec un handicap sévère qui sont envoyées en Belgique.

Ass nat

M. le président. La parole est à M. Hervé Pellois, pour exposer sa question, no 1371, relative au placement des personnes handicapées en Belgique.

M. Hervé Pellois. Madame la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, je voudrais vous remercier pour la journée mondiale de sensibilisation à l’autisme que vous avez mise en valeur avec le Président de la République vendredi dernier, et qui a donné lieu à de très nombreuses mobilisations partout dans notre pays et sur les chaînes de télévision. J’ai eu le plaisir de rencontrer pour ma part l’association « Papa maman et moi construisons avec l’autisme » dans ma circonscription de Vannes, où opère le Centre national des soins à l’étranger (CNSE) qui traite notamment des paiements des établissements non conventionnés qui reçoivent en grand nombre nos compatriotes adultes handicapés, soit près de la moitié des 8 500 personnes expatriées en Belgique – 7 000 adultes et 1 500 enfants.

En 2016, j’avais déjà interrogé le Gouvernement sur le nombre croissant des placements, notamment des adultes. Depuis, la situation n’a fait que s’aggraver : 2 300 adultes en 2015 pour un coût de 103 millions d’euros, 3 900 adultes en 2020 pour 193 millions d’euros. Ce nombre n’a progressé que de 2 % en 2020, ce qui semble indiquer un revirement tangible de notre politique dont il convient de vous féliciter.

Actuellement, 146 établissements ne sont toujours pas conventionnés. Pouvez-vous nous dire si le plan de conventionnement décidé par l’État sur quatre ans et qui devait être mis en place en 2020 est opérationnel ? Par ailleurs, qui contrôle les établissements, et notamment la qualité des soins et des personnels ? Des abus de facturation sont toujours mentionnés par le CNSE, mais a posteriori.

Je souhaiterais également connaître l’avancement des annonces faites par le Gouvernement en février 2020 concernant la création de plus de 1 000 places en établissements français entre 2021 et 2022, et les mesures supplémentaires qui pourraient être élaborées pour venir en aide aux départements du Nord et de Seine-Saint-Denis, particulièrement dépendants de ces structures belges non conventionnées.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées.

Mme Sophie Cluzelsecrétaire d’État chargée des personnes handicapées. La journée mondiale de sensibilisation à l’autisme, le 2 avril, a été placée sous l’égide du Président de la République, et je me suis récemment rendue avec lui à Saint-Egrève, en Isère, où nous avons visité une unité de soins précoces réservée aux enfants – le repérage précoce des troubles du neurodéveloppement est en effet l’un des domaines où nous devons changer la donne –, ce qui nous a permis de constater les avancées obtenues en la matière.

Vous m’interrogez sur les adultes. Aujourd’hui, parmi les personnes présentant des troubles du neurodéveloppement, plus de 700 000 ont un diagnostic d’autisme, qu’il soit on non déjà posé, dont près de 600 000 adultes pour lesquels nous travaillons justement à l’amélioration de leur diagnostic. Actuellement, 8 000 Français sont accueillis en Belgique et les départs d’adultes se poursuivent. Je précise que ce ne sont pas seulement les personnes autistes qui partent en Belgique, mais aussi celles atteintes d’un polyhandicap ou présentant une déficience intellectuelle. Si certains ont choisi de partir, d’autres, trop nombreux, ont accepté ce choix faute de solution en France. Nous ne pouvons plus tolérer cette situation. Nous sommes le premier gouvernement à mettre fin à ce scandale qui consistait à financer des places à l’étranger, à tolérer le démarchage commercial dans nos hôpitaux sanitaires. Nous avons décidé de lancer, avec mon homologue wallonne Christie Morreale dont je salue l’engagement à nos côtés, un moratoire sur la création de places d’accueil d’adultes en Wallonie. Je tiens à rassurer les familles : les projets d’orientation avalisés avant le 28 février, date de ce moratoire, seront honorés car nous ne voulons pas de ruptures de parcours qui sont en cours. Les trois régions les plus concernées par les départs vont recevoir 90 millions d’euros : plus de 26 millions pour les Hauts-de-France, 51 millions pour l’Île-de-France et 13 millions pour le Grand Est. 650 places nouvelles sont d’ores et déjà programmées dans ces trois régions, et d’ici à 2023 nous aurons proposé au moins 1 000 solutions nouvelles.

J’ai mis en place un comité national de suivi de ce plan de création, associant tous les acteurs des associations et bien sûr des départements, avec lesquels nous partageons cette responsabilité. C’est un engagement fort de l’État, un engagement collectif dont nous pouvons être fiers. Nous travaillons sur la création d’unités de vie de six personnes destinées aux adultes atteints de troubles sévères du spectre autistique, si complexes à accompagner. Nous devons privilégier ces solutions d’accueil dignes et respectueuses pour ces adultes qui trop longtemps ont été en errance, faute d’une prise en charge accompagnée.

Vous pouvez compter sur ma détermination à faire respecter ce plan. La mobilisation des associations gestionnaires des départements et des ARS est une priorité, un engagement de la grande stratégie nationale pour l’autisme au sein des troubles du neurodéveloppement.

M. le président. La parole est à M. Hervé Pellois.

M. Hervé Pellois. Merci madame la ministre, pour votre engagement et ces mots d’espoir, si nécessaires pour nous tous, pour notre pays, pour les familles et pour ces personnes qui sont en grande difficulté. En tant qu’élus, nous sommes régulièrement alertés sur ces difficultés et ce manque de solutions d’accueil. Les efforts consentis par le Gouvernement sont louables, mais on doit à la fois réduire le nombre de personnes accueillies en Belgique – c’est quand même 8 000 emplois perdus pour la France au bénéfice de nos amis belges – et le temps d’attente des familles. Je sais que ce chantier important prendra du temps, mais l’engagement de l’État aux côtés des collectivités, en particulier du département, est plus que jamais nécessaire.

M. le président. Nous avons terminé avec les questions orales sans débat.

Lien de la question parlementaire sur le site de l’Assemblée nationale.

Arrêté français : expertise des psychologues

France : arrêté du 10 mars 2021 relatif à la définition de l’expertise spécifique des psychologues mentionnée à l’article R. 2135-2 du code de la santé publique : entre autres dispositions : prise en compte des demandes et de l’expertise de la famille, respect des recommandations de la Haute Autorité de Santé !

Il s’agit d’un arrêté, donc il faut absolument le respecter.

Un grand pas en avant pour la valorisation des approches scientifiques et l’écartement de la psychanalyse. Ne nous leurrons pas, les psychanalystes essaieront de s’immiscer via cette précision : “Une liste non exhaustive de programmes se référant à ces approches est établie en annexe. Cette liste sera réactualisée périodiquement en fonction de l’évolution des connaissances scientifiques, des recommandations et des outils”. On pourrait entendre d’ici leurs réclamations. Espérons que le législateur restera ferme sur ses positions.

Lire l’arrêté.

Quand on ne sait pas, on ne dit pas…

Interview de Christine Meignien (présidente de Sésame Autisme) sur handicap.fr (8 avril 2021)

Passage sur les Français de Belgique :

Autisme et Covid-19 : Isolés en Belgique

Une autre faille sur laquelle je me suis battue alors que le silence régnait, c’est celle des personnes handicapées hébergées en Belgique. J’ai fait remonter ce problème durant des mois, car je suis en lien avec de familles qui n’ont pas vu leur enfant depuis février, ce qui est totalement insupportable. Le gouvernement n’a pas pris le temps de discuter avec ses homologues en Belgique, alors même que c’est déjà un sujet très sensible en temps normal. Ce n’est que depuis octobre que Sophie Cluzel a nommé une personne en charge de ce dossier, alors que des enfants sont retenus dans leur établissement depuis février sans pouvoir revoir ou recevoir leur famille. Des parents étaient prêts à faire une grève de la faim pour avoir des réponses, car ils n’avaient aucune nouvelle de leur enfant et aucune possibilité d’aller le voir, c’est vous dire jusqu’à quel point ils étaient désespérés. Rappelons qu’il s’agit de 7000 personnes que le gouvernement français a laissé tomber. Des parents réclament aujourd’hui que soit mis en place dans ces établissements un conseil de la vie sociale comme en France, afin de savoir comment leur enfant est pris en charge, quel est son quotidien, quels sont les professionnels qui s’en occupent. Au sein de Sésame Autisme nous avons créé un groupe « Familles France/Belgique » pour qu’elles puissent avoir un lieu d’échanges. Depuis le 28 décembre, le gouvernement a enfin mis en place un numéro d’appel pour les familles. En ma qualité de mère, je n’ose pas imaginer si ma fille et moi avions dû vivre cela.

Lire l’article en entier ici.

En vérité, il y a eu véritable suspension de visites et de retours en famille (déconseillés ou interdits du 13 mars au 8 mai 2020). Jeunes : déconseillés. Adultes : interdits.

Le 8 mai, les visites étaient autorisées sous conditions.

Puis, il y a eu le déconfinement, circulaire du 26 mai. Complément du 4 juin. Modification du 9 juin : Jeunes. Adultes (le 22). Modifications du 30 juillet.

23 octobre : nouvelle vague Covid : circulaire adultes – 30 octobre : circulaire jeunes.

22 janvier 2021 : Nouvelles mesures pour les variants.

25 mars 2021 : mesures d’assouplissement liées à la vaccination.

Et le conseil des usagers est obligatoire depuis l’arrêté de 2018, auquel l’AFrESHEB a participé…

Moralité : parents d’enfants/d’adultes français en situation de handicap, ne tirez pas vos informations d’une présidente d’association gestionnaire n’ayant jamais mis les pieds en Belgique.

Renseignez-vous plutôt auprès de l’AFrESHEB (Association pour les Français en situation de handicap en Belgique).

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Taintignies : résolution déposée par le PTB

résolution

Le parti des travailleurs belges (à gauche de la gauche) a déposé une résolution intéressante pour assainir le secteur des établissements accueillant des Français en situation de handicap. Nous suivrons son cours législatif et nous vous tiendrons informés.

Nous espérons que sera aussi retenu par les élus notre proposition d’encadrement des loyers, de sanctions pécuniaires envers les établissements faisant preuves de dysfonctionnements volontaires répétés malgré des avertissements, avec comme pendant des fonds supplémentaires attribués aux établissements méritants pour des places et/ou des projets.

Lire la résolution du PTB.